
« L’exposition Nuit Flamme qu’André Fortino réalise au Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur, prend appui sur une installation vidéo. La séquence, ténue, ne dure à l’origine que quelques secondes, elle montre un jeune homme torse nu, le regard absent, et qui tient contre sa poitrine deux torches allumées dont les flammes ardentes lèchent jusqu’à son visage. La vidéo a été tournée par l’artiste au Sud de l’Inde durant un rituel de Theyyam. Plusieurs semaines durant, la nuit, André Fortino a sillonné les villages de l’État du Kerala pour assister à ces cérémonies « archaïques » saisonnières que des communautés aborigènes font perdurer depuis plus de quatre millénaires. Lors de ces rituels, des chamanes entrent en contact avec les mondes invisibles afin d’attirer la bienveillance des dieux. Des hommes maquillés, costumés, deviennent des divinités, tandis que d’autres font offrande du feu. Des heures de vidéos qu’il a tournées, l’artiste n’a finalement gardé que quelques secondes, étirées à l’infini : un jeune homme et ses torches de feu dont la présence, malgré son corps à l’écran, semble exister dans un monde invisible. André Fortino a vécu la puissance spirituelle de ces moments d’incantations, il a partagé l’expérience troublante de la modification de conscience et c’est ce seul moment extatique qu’il choisit de conserver. »
Extrait du texte de Guillaume Mansart, André Fortino, Les Images transcendées, paru dans Ce même monde no. 3, le magazine du Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur